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À l’heure où nous bouclons ce numéro, l’Europe connaît l’une des crises diplomatiques les plus graves depuis la fin de la guerre froide, l’Ukraine se déchirant entre partisans d’une ouverture vers l’Europe et militants pro-Russes, la Crimée ayant fait sécession et obtenu son rattachement à la Russie. Les bruits de bottes ne sont pas si loin, ce qui a de quoi sidérer plusieurs générations d’Européens, un siècle tout juste après le déclenchement de la Première Guerre mondiale ; une guerre lourde de conséquences pour le continent et dont l’analyse rétrospective des choix politiques et stratégiques qui y ont mené n’est pas sans intérêt d’un point de vue prospectif.
Jean-François Drevet s’intéresse ici à trois éléments d’ordre stratégique ou prospectif impliqués dans le déclenchement et le déroulement de la guerre 1914-1918, dont l’issue s’est révélée pour le moins contraire à celle envisagée par leurs parties prenantes. Il s’agit de l’alliance franco-russe qui, présentée comme un facteur de maintien de la paix, a conduit à une généralisation de la guerre ; du plan Schlieffen qui, en violant la neutralité belge, a entraîné l’intervention britannique, décisive dans la défaite allemande ; et enfin de la stratégie française de l’attaque à outrance, humainement très coûteuse à l’ère des mitrailleuses. De telles erreurs d’anticipation, émanant de personnalités compétentes et bien informées, arc-boutées sur leurs certitudes, ne doivent pas être oubliées, rappelle Jean-François Drevet, notamment dans le contexte actuel de crise économique et financière, dans laquelle la haute finance internationale — pendant contemporain, par son pouvoir, des militaires du début du XXe siècle — fait souvent fi des mises en garde et demandes de régulation émanant du corps social. |